Hommage au Professeur Michel Godin (1947-2023) 

C’est avec une immense tristesse que le Conseil d’administration de la Fondation du Rein a appris la disparition du Professeur Michel Godin, ancien Président de la Fondation du Rein, survenue le 7 novembre 2023, à l’âge de 76 ans.

Le Pr Michel GODIN a été chef du service de Néphrologie du CHU de Rouen, Président de la Fondation du Rein et de la Société Francophone de Néphrologie, Dialyse et Transplantation (SFNDT) lorsqu’elle n’était encore que la Société de Néphrologie.
Michel était un être exceptionnel, d’une extrême gentillesse, généreux, très dévoué à sa famille et ses patients, mais aussi à la Fondation du Rein dont il fut le Président particulièrement actif de 2011 à 2016. Il était plein d’humour, avec un sens de l’autodérision sans pareil, et d’une élégance très britannique.
Michel laisse un grand vide derrière lui, mais aussi une belle école de Néphrologie à Rouen, mais aussi dans toute la France. Il fut l’élève du Professeur Jean-Paul Fillastre, lui-même élève du Professeur Gabriel Richet, pionnier de la Néphrologie française. La famille de la néphrologie française et francophone se réunit à nouveau à travers ces mots pour lui rendre hommage.

Nos pensées vont vers son épouse, Marie-Claire, et celle de leurs trois enfants, Matthieu, Bénédicte et Jean-Baptiste, et de leurs petits-enfants, Paul, Alice, Capucine, Léon, Maxime, Gabin, Camille et Charles.

Ses obsèques religieuses ont été célébrées le mercredi 15 novembre 2023 en l’église Sainte-Trinité de Bois-Guillaume.

La Fondation du Rein tient à remercier la famille du Professeur Michel Godin qui a tenu à ce qu’un recueil à dons soit ouvert au profit de la Fondation du Rein abritée par la Fondation pour la Recherche Médicale (FRM), en envoyant un chèque à Fondation du Rein/FRM, 54 rue de Varenne 75007 Paris ou en faisant un don sur https://fondation-du-rein.org/faire-un-don/.
Laissons maintenant ses élèves et successeurs du CHU de Rouen parler de lui.
Dr Brigitte Lantz, Secrétaire générale

« Après une formation médicale initiale à Nantes, puis un internat réalisé à Paris, Michel Godin a rejoint Rouen où pendant plus de 30 ans il a formé avec Jean-Paul Fillastre un duo efficace et synergique qui a fondé, puis développé avec brio la néphrologie en Normandie.  

Le Pr Godin était un universitaire au sens propre du terme, habité par l’enseignement et par l’envie de transmettre aux étudiants. Par la passion qu’il mettait dans ses cours, ses ateliers et ses enseignements au tableau lors des staffs, il a profondément marqué des générations d’étudiants en médecine, dont plusieurs l’ont suivi pour embrasser la néphrologie à Rouen et en France. Conscient de l’importance du lien avec la ville, il aimait organiser des formations post-universitaires auprès des collègues de médecine générale, autour de la néphrologie et de l’hypertension artérielle, son deuxième domaine de prédilection.

Le Pr Godin a occupé des responsabilités nationales importantes, notamment en tant que Président de la Société de Néphrologie et de la Fondation du Rein et Président du Conseil National des Universités de Néphrologie. Il était particulièrement reconnu et apprécié au sein de la communauté néphrologique francophone.

Michel Godin était un homme intelligent, drôle et chaleureux, qui savait aussi pointer sans concession les travers du monde médical et administratif de l’hôpital. Il a, pendant toutes ces années, animé avec enthousiasme et charisme les événements néphrologiques organisés en Normandie, qu’il aura durablement marquée de son empreinte. Dans son service, il a créé une atmosphère familiale, en restant toujours fidèle à ses deux règles prioritaires : que les patients soient bien soignés et que les membres de son équipe soient heureux de venir travailler. Les médecins de son équipe sont conscients de la chance qu’ils ont eue d’avoir pu partager la route d’un homme aussi brillant et passionné. 

La perte que nous ressentons aujourd’hui est profonde. Nous pensons naturellement à sa famille, dont de nombreux membres de notre communauté sont également proches. 

Nous nous efforcerons de perpétuer l’héritage que Michel Godin nous a laissé, avec engagement et passion, comme il le fit tout au long de cette carrière exemplaire. »

Pr Dominique Guerrot et Dr Frank Le Roy, CHU de Rouen

Hommage au Professeur Paul Jungers (1932-2022) 

C’est avec grande tristesse que le Conseil d’administration de la Fondation du Rein a appris la disparition du Pr Paul Jungers, survenue le 1er avril 2022, à l’âge de 89 ans.

Originaire de Lorraine, issu d’une famille modeste, le Pr Paul Jungers disait avoir appris très jeune auprès des siens le culte du travail et de la dignité. Sorti Major du PCB de Nancy, il est admis comme boursier à la cité Universitaire et débute ses études de médecine à Paris. Accepté d’emblée comme interne, puis comme chef de clinique (1961-1970), et enfin comme agrégé, il a eu le privilège de vivre toutes les étapes de l’aventure de la néphrologie, de la naissance de la réanimation médicale aux débuts du traitement de l’insuffisance rénale aiguë par le rein artificiel, puis de l’insuffisance rénale chronique par l’hémodialyse périodique, et ensuite aux perfectionnements continus du traitement conservateur de l’insuffisance rénale chronique et de sa prévention.

Le Pr Paul Jungers a dévéloppé durant les 40 années passées à l’hôpital Necker un programme de recherche éclectique, couronné de plus de 300 publications, dans les revues les plus prestigieuses.
Son dynamisme était entraînant : plusieurs générations d’internes, de chefs de clinique,  de médecins en cours de spécialisation, de résidents venus de toutes les parties du monde, de médecins des centres de dialyse associés : il proposait un travail scientifique dès qu’il repérait une bonne volonté ou un savoir faire.

Le fil conducteur de ce travail titanesque ? « faire bénéficier sans retard les patients des avancées thérapeutiques au fur et à mesure de leur découverte, en s’appuyant sur les acquis les plus récents ». La plupart des études ont débouché sur des applications thérapeutiques concrètes. Parmi les principaux sujets abordés :

  • L’hépatite B. Paul Jungers décrit l’épidémiologie de l’incidence de l’hépatite B chez les patients et le personnel soignant des unités d’hémodialyse, et devient coordonnateur de l’essai randomisé national du vaccin produit par l’Institut Pasteur. Il faut convaincre les collègues de la nécessité d’un essai randomisé prospectif, impliquant par définition que la moitié des sujets participants seront exposés au risque de contamination. Le comité national d’éthique, créé à cette occasion, valide le principe de cet essai et permet d’entrainer l’adhésion de tous. A partir de 1981, la vaccination permet d’éradication progressive de l’hépatite B dans les unités de dialyse et de réanimation, et sa prévention dans la population générale.
  • Traitement des formes sévères de néphropathie lupique. L’adjonction de cyclophosphamide aux corticoïdes, sous l’impulsion de JF Bach, évaluée chez 32 patientes, améliore considérablement le taux de rémission des formes sévères de néphropathie lupique
  • Grossesse chez les patientes lupiques. Les études épidémiologiques conduites avec Maxime Dougados, François Tron, Frédéric Lioté et Pascal Houillier ont permis de définir les conditions à respecter pour obtenir une évolution fœtale et maternelle favorable de la grossesse chez les femmes atteintes de néphropathie lupique. Une collaboration avec le service d’endocrinologie de l’hôpital Necker permet de définir les règles d’une contraception hormonale évitant le risque d’exacerbation de la maladie.
  • Problèmes de la grossesse chez les femmes atteintes de néphropathie. La survenue d’une grossesse était à l’époque déconseillée chez les femmes atteintes d’une maladie rénale. Considérant que le désir de maternité était légitime chez toute femme, et que cette interdiction ne reposait pas sur des bases démontrées, Paul Jungers entreprend une étude épidémiologique avec l’aide de Pascal Houillier et de Dominique Forget portant sur plus de mille patientes atteintes de maladies rénales de tous types et ayant, ou non été enceintes avec l’aide de Pascal Houillier et de Dominique Forget. Cette étude permet de déterminer les conditions optimales d’une grossesse planifiée permettant d’aboutir à la naissance d’un enfant vivant, sans aggravation de la néphropathie maternelle. De plus, une étude cas-témoin portant sur 360 femmes atteintes de différents types de glomérulonéphrites primitives permet de démontrer que la grossesse par elle-même n’augmente pas le risque d’évolution vers l’insuffisance rénale lorsque la fonction rénale était initialement normale ou proche de la normale. Ces études ont permis à de nombreuses femmes de mener à bien leur désir de maternité et leurs conclusions ont été universellement confirmées et adoptées.
  • Traitement de l’urémie chronique par les cétoanalogues. La possibilité de ralentir la progression de l’urémie en diminuant la production d’urée à l’aide d’une préparation d’acides aminés essentiels amputés de leur radical azoté a été étudiée à partir de 1982 avec Philippe Chauveau. Cette méthode a permis de retarder substantiellement la date de la dialyse de suppléance chez de nombreux patients, objectif important à cette époque où le nombre de postes de dialyse était encore très insuffisant. Cet abord nutritionnel, contraignant et difficile à supporter, fut délaissé en France lorsque la disponibilité en postes de dialyse est devenue suffisante, avant d’être de nouveau mise à disposition il y a quelques années.
  • Mise en évidence des conséquences défavorables d’une prise en charge en dialyse tardive des patients atteints d’insuffisance rénale chronique et, au contraire, des bénéfices d’un suivi néphrologique précoce
  • Evaluation des indications respectives de la dialyse de suppléance et du traitement conservateur et de leurs conséquences chez les sujets très âgés atteints d’insuffisance rénale avancée
  • Mise en évidence, avec Philippe Chauveau et Malik Touam, du rôle athérogène de l’hyperhomocystéinémie dans l’insuffisance rénale chronique, et de la possibilité de sa correction par un apport oral d’acide folique, qui a pour effet bénéfique supplémentaire d’améliorer l’érythropoièse.
  • Etude de la dysrégulation immunitaire induite par l’état urémique, notamment mise en évidence de l’augmentation du taux plasmatique des cytokines pro-inflammatoires (TNFalpha et IL-1bêta)  et des produits avancés d’oxydation des protéines (AOPP), responsables d’un stress oxydant concourant à l’athérogenèse, avec Béatrice Descamps-Latscha et Lucienne Chatenoud.
  • Démonstration épidémiologique d’une incidence trois fois plus élevée d’accidents athérothrombotiques chez les insuffisants rénaux dialysés et prédialysés, caractérisant un athérome accéléré, et analyse des facteurs de risque d’athérome chez l’urémique, conduisant au concept de l’importance de la cardioprotection chez ces patients, avec Ziad Massy, Thao Nguyen-Khoa et Gérard London.
  • Enquête épidémiologique exhaustive sur l’incidence de l’insuffisance rénale terminale traitée par dialyse de suppléance en Ile de France en 1998, qui a servi d’étude pilote pour l’élaboration du programme, national REIN (Réseau Epidémiologie et Information en Néphrologie).
  • Révision complète, avec Michel Daudon, des conceptions sur l’exploration et le traitement médical de la lithiase urinaire, tant dans ses formes communes que dans ses formes héréditaires sévères, et élaboration de nouvelles règles pratiques adoptées par l’ensemble de la communauté uro-néphrologique.

Le Pr Paul Jungers fut aussi un enseignant remarquable, passionné et captivant. Ses ouvrages didactiques sur la lithiase, l’IRC, la dialyse, régulièrement réédités et actualisés, ont formé et continuent de former des générations de néphrologues francophones.

Respecté et admiré, mais loin d’être intimidant, Paul Jungers était très proche du personnel soignant, et il fut un clinicien empathique, véritablement à l’écoute des patients dans le cadre de ses consultations et lors des hospitalisations. En avance sur son temps, il avait compris l’importance d’une prise en charge globale du patient et non pas exclusivement technique de la maladie rénale.

Partant du principe que ce n’est pas seulement au patient de s’adapter au traitement, mais aussi au traitement de s’adapter au patient, il m’est apparu indispensable d’adapter individuellement les prescriptions thérapeutiques aux conditions de vie et d’activité, au contexte familial et à l’âge des patients, et de prêter la plus grande attention à leur moral et à leurs préoccupations. Ma meilleure récompense a été de voir de nombreux patients, qui abordaient la consultation avec un visage fermé et anxieux, en repartir avec le sourire, assurés que tous les moyens existants étaient mis en œuvre pour retarder l’échéance de la dialyse et leur permettre de mener une vie aussi normale que possible.

Chercheur, enseignant et médecin accompli, le Pr Paul Jungers fut un modèle pour beaucoup. Ceux qui ont eu la chance de travailler à ses côtés ont aimé l’homme enthousiaste, fourmillant d’idées, perspicace, tenace, droit et exigeant certes, mais aussi chaleureux, attentif et disponible.

En 2012, le Pr Paul Jungers avait reçu avec émotion la médaille Jean Hamburger de la Société de Néphrologie. La famille de la néphrologie française et francophone se réunit à nouveau à travers ces mots pour lui rendre hommage.

Nos pensées vont vers son épouse, Suzanne Jungers, ses enfants M. et Mme Olivier Jungers, M. et Mme Pierre-Yves Jungers, et ses petit-enfants, Pierre, Victoire, Bryan, Lara, et Nicolas.

Pr Dominique Joly, Hôpital Necker

Hommage à Monsieur Alain Trouillet (1946-2021) 

Le Conseil d’administration de la Fondation du Rein a appris avec une infinie tristesse la disparition soudaine du Président de France Rein, Monsieur Alain Trouillet, survenue le 2 décembre 2021, à l’âge de 75 ans.

Toujours fidèle à sa région de cœur, la Sarthe, Alain Trouillet y a fait toute sa carrière professionnelle en tant que dirigeant et responsable administratif et financier de diverses entreprises. Membre du Conseil de Prud’homme du Mans depuis 1999, il en prend la présidence en 2019. 

C’est en 1998 qu’Alain apprend qu’il est atteint, comme son frère Michel, d’une maladie rénale génétique. A la suite du décès de ce frère tant aimé en 2001, Alain s’investit dans le monde associatif et devient bénévole à la Fédération nationale d’aide aux insuffisants rénaux (FNAIR). Il adhère à France Rein en 2007, alors qu’il prend sa retraite et entre en dialyse. Il a la chance d’être greffé quelques mois plus tard et deviendra un ardent défenseur du don d’organe. Grand sportif, amoureux de la nature et des randonnées en montagne, il participe ainsi à un semi-marathon au Mans pour faire la promotion du don d’organe peu de temps après sa greffe.

En 2012, Alain prend la présidence régionale de France Rein pour les Pays de la Loire, est élu à la Présidence nationale de cette association en 2019, qu’il modernise notamment en lui donnant un nouveau site Internet. Très organisé et consensuel, privilégiant les relations apaisées et les échanges constructifs, il donne une grande importance à la relation soignant-soigné. Sa seule ambition est de développer la prévention des maladies rénales. Malgré la crise sanitaire liée à la COVID-19, qui freine nombre de ses projets, Alain reste particulièrement actif sur les réseaux sociaux et participe à différents webinaires organisés par la Société Francophone de Néphrologie Dialyse et Transplantation (SFNDT), et collabore à la rédaction du « Livre blanc de la Transplantation ». 

Ses compétences, son sérieux, son intégrité, sa grande implication, sa bienveillance ont fait l’objet d’un livre d’or à sa mémoire. Face à la maladie, Alain a fait preuve d’un remarquable courage, qui forçait l’admiration.

La cérémonie religieuse a eu lieu le mercredi 8 décembre 2021 en l’Église Saint-Aldric du Mans.

Nous adressons toutes nos condoléances les plus affectueuses à son épouse Lucette, ses enfants, Sébastien et Valérie, et ses quatre petits-enfants Hugo, Lola, Tom et Zoé, ainsi qu’à sa sœur, le Dr Marie Vaysse, également très investie à France Rein, qui l’a souvent représenté à nos conseils de fondation. Qu’ils soient tous fiers de tout ce qu’Alain Trouillet a réalisé pour aider les patients à dépasser la maladie rénale chronique.

 

Dr Brigitte Lantz, Secrétaire générale de la Fondation du Rein

Hommage à Monsieur Michel Raoult (1946-2021)

Le Conseil d’administration de la Fondation du Rein a appris avec une grande tristesse la disparition brutale de Michel Raoult survenue le 6 mai 2021, à l’âge de 75 ans. Il a fondé la Ligue Rein et Santé (LRS) en 2006, association partenaire de la Fondation du Rein depuis sa création.

Michel Raoult était président de la Ligue Rein et Santé, qu’il avait fondée en 2006 avec deux objectifs : information sur la santé rénale pour tous et gratuite, représentation et défense des intérêts des patients.

C’était une figure incontournable du monde associatif. Avec une énergie inépuisable malgré ses soucis de santé, il n’avait de cesse de trouver de nouvelles idées pour informer les malades le plus objectivement possible, sans parti pris. Il était à juste titre convaincu de l’importance de la prévention des maladies rénales. Outre trois livrets sur la santé rénale publiés chez L’Harmattan, il a animé la revue Rein Echos jusqu’en 2016, l’infolettre LRS qui a continué à paraître plusieurs années après, sans oublier l’organisation de plusieurs états généraux de l’insuffisance rénale dans les années 2010.

Michel cherchait toujours à collaborer avec les néphrologues et non à les provoquer, et c’est ainsi qu’il avait sollicité mon concours, comme celui de plusieurs collègues, dès 2010. Nous avons pu travailler ensemble à de nombreuses reprises de façon très fructueuse pour délivrer une information simple mais de qualité, chacun confrontant ses points de vue mais restant dans son domaine de compétences. De véritables liens d’amitié se sont tissés entre nous au cours des années.

Michel, qui pouvait paraître réservé au premier abord, avait une forte personnalité, un humour caustique, des idées que je ne partageais pas toujours, et il lui arrivait comme à nous tous de manquer de diplomatie ! Nous en avons discuté plusieurs fois, toujours dans un respect mutuel et une estime réciproque. C’était avant tout un homme honnête, engagé et courageux.

Nous adressons nos pensées et nos condoléances les plus émues à son épouse, Andrée, et à ses enfants. Qu’ils soient fiers de tout ce que Michel Raoult a fait pour aider les malades du rein dans leur parcours.

 

Dr Olivier Kourilsky

Hommage au Professeur Claude Dreux (1930-2021)

Le Conseil d’administration de la Fondation du Rein a appris avec grande tristesse la disparition du Pr Claude Dreux survenue le 16 mars 2021, à l’âge de 91 ans. Il fut un membre très actif du Conseil d’administration de la Fondation du Rein de 2005 à 2019.

Pharmacien, docteur ès Sciences, professeur émérite de Biochimie à l’Université René Descartes (Paris V), ancien Chef du Service de Biochimie et de Neurobiologie de l’Hôpital Saint-Louis à Paris, Vice-Président honoraire de l’Université René Descartes (Paris V) et Doyen honoraire de la Faculté des Sciences Pharmaceutiques et Biologique de cette même université, membre du comité consultatif auprès des Communautés européennes pour la formation des pharmaciens, le Professeur Claude Dreux était également membre des Académies nationales de pharmacie et de médecine, officier de la Légion d’honneur et commandeur de l’ordre national du Mérite.

Toujours dynamique au service des patients, il laissera le souvenir d’un fervent défenseur de la prévention des maladies rénales, très actif dans les campagnes de prévention avec le Cepharm, qu’il présidait, lors des campagnes de la Fondation du Rein, notamment à l’occasion de la Journée Mondiale du Rein.

La cérémonie religieuse a eu lieu le mercredi 24 mars 2021 à 14 h 30, en l’église Saint-Jean-Baptiste-de-Grenelle à Paris.

Le conseil d’administration tient à exprimer ses condoléances attristées à son épouse Marie-Claude, à ses enfants, Pierre et Sophie, ainsi qu’à ses petits-enfants, Guillaume et Betty, Coralie et Ludovic.

Dr Brigitte Lantz, Secrétaire générale de la Fondation du Rein

Hommage à Olivier Dassault (1951-2021)

Le Conseil d’administration de la Fondation du Rein tient à exprimer ses plus sincères condoléances à la famille de Monsieur Olivier Dassault, Député de l’Oise, décédé tragiquement dans un accident d’hélicoptère, le 7 mars 2021, et tout spécialement à son frère Thierry, Vice-Président de la Fondation du Rein.

Olivier Dassault a mis son nom illustre au service de la France, avec le souci constant de l’Autre. Comme tous ses frères et sœur, il apportait son soutien à de nombreuses fondations, dont la Fondation du Rein, car il avait le mécénat dans le sang, à l’image de son grand-père Marcel Dassault, et de ses parents Serge et Nicole Dassault.

Passionné d’aviation, Olivier Dassault a intégré l’école de l’air à l’âge de 20 ans dans le corps des officiers de l’air avant de basculer en 1974, dans la réserve opérationnelle, jusqu’au grade de commandant, en 2000. Cet entrepreneur de talent, député au grand cœur, d’une générosité extrême, excellent pianiste et photographe de renom, va laisser un vide immense. Olivier Dassault ne faisait jamais de différence entre les puissants et les plus modestes en ayant toujours la délicatesse et l’élégance qui le caractérisaient. Il était chevalier de la Légion d’Honneur, officier dans l’ordre national du Mérite et officier de l’ordre des Arts et des Lettres.

Ses obsèques se sont déroulées dans la matinée du 12 mars 2021, dans la Cathédrale Saint-Pierre de Beauvais, tandis qu’une seconde messe a été célébrée dans l’après-midi à Paris dans la Cathédrale Saint-Louis-des-Invalides. Les honneurs militaires lui ont été rendues à Beauvais et aux Invalides, de même qu’un hommage national par le Président de la République, différents membres du Gouvernement et du Parlement.

Nous pensons avec affection à son épouse Natacha, à ses trois enfants, Héléna, Rémi et Thomas, dont il était si fier, à ses deux frères Thierry et Laurent, et à sa sœur Marie-Hélène, particulièrement éprouvés ces trois dernières années, dont nous partageons la peine immense.

 

Dr Brigitte Lantz, Secrétaire générale de la Fondation du Rein

Hommage au Professeur Michel Broyer (1933-2020)

Nous avons la grande tristesse de vous annoncer le décès du Professeur Michel Broyer le 10 mars 2020 à l’âge de 86 ans des suites d’une infection par le COVID19.

Elève du Professeur Pierre Royer auquel il a succédé comme chef de service de Néphrologie Pédiatrique à l’Hôpital Necker – Enfants-Malades de 1978 à 1999, le Professeur Michel Broyer a été le premier dans les années 60 à développer et adapter à l’enfant les techniques de dialyse, en particulier l’hémodialyse. C’était une période héroïque où l’abord vasculaire se faisait par un shunt artério-veineux externe et les séances duraient plus de 8 heures. Au début des années 70, le Pr Michel Broyer a instauré la transplantation rénale pédiatrique en France et permis ainsi aux enfants atteints d’insuffisance rénale terminale de survivre et de retrouver une vie presque normale. Depuis, plus de 1300 transplantations rénales ont été réalisées à l’hôpital Necker.

Le Pr Michel Broyer a étudié tous les domaines de la néphrologie pédiatrique, ce dont témoigne sa liste de plus de 400 publications. Le Pr Michel Broyer et le Dr Renée Habib sont internationalement reconnus pour avoir décrit de nouvelles entités parmi les maladies rénales de l’enfant. Dès 1975, ils organisaient un séminaire annuel de Néphrologie Pédiatrique auxquels participaient de nombreux pédiatres et néphrologues. Michel Broyer a initié le “Club de Néphrologie Pédiatrique” dont il définissait ainsi le rôle : « La réunion annuelle du Club a été et demeure pour les plus jeunes une instance d’apprentissage à la communication, étape préalable et logique à la participation aux réunions internationales. La dimension réduite du Club a aussi permis de conserver ce sentiment que les membres peuvent avoir d’appartenir à une même famille où tous se connaissent et sont susceptibles de s’entraider. Grâce au Club, des études coopératives ont pu être menées à bien. Avec le temps, la qualité scientifique des réunions continue à s’améliorer, tandis que leur tonalité reste très conviviale. » En 2000, le Club a pris le nom de Société de Néphrologie Pédiatrique. La convivialité entre néphrologues pédiatres perdure avec l’initiative du Pr Michel Broyer d’une réunion culturelle de trois jours des anciens après l’arrêt de leurs activités professionnelles. C’est lui qui avait organisé cette réunion à Lorient en 2015.

Avec le Pr Pierre Royer et le Dr Renée Habib, le Pr Michel Broyer a fait que la Néphrologie Pédiatrique Française soit à la pointe et internationalement reconnue.

Le Pr Michel Broyer a eu de nombreux élèves en France et à l’étranger.  Beaucoup d’entre eux sont devenus des leaders dans leur pays. Tous gardent de Michel Broyer l’image d’un patron bienveillant dont ils admiraient les connaissances médicales, la rigueur scientifique et la générosité pour les enfants, leurs familles et ses collègues.

Michel Broyer a eu un rôle majeur dans le développement du registre de l’European Dialysis Transplantation Association et dans l’association “France Transplant”. Il a été éditeur de la revue “Pediatric Nephrology”. Il a présidé pendant plusieurs années le Comité d’Ethique de l’hôpital Necker-Enfants Malades.

Michel Broyer était au sens noble du terme un “honnête homme”.

Nous nous associons à la peine de son épouse, Rosy, de ses trois enfants et de ses petits-enfants.

 

Pr Patrick Niaudet et Pr Rémi Salomon

Hommage à François Tajan (1962-2020)

Personnalité reconnue du monde des ventes aux enchères, le commissaire­-priseur au grand cœur, François Tajan, était un fidèle de la Fondation du Rein dont il a accompagné chacun de ses galas. Lors de ses ventes aux enchères, c’était lui qui tenait toujours le marteau avec enthousiasme et talent. Il choisissait aussi avec soin les œuvres offertes par la librairie d’Art d’Arcurial pour chacune de ses tombolas. Il s’est éteint brutalement à l’âge de 57 ans le 26 février 2020 d’une intoxication par de mauvais champignons. Avec un humanisme rare, il a contribué au succès de la maison Artcurial, dont le groupe Dassault est actionnaire majoritaire.

Très ému, Hervé Poulain, président d’honneur de la maison de ventes aux enchères du Rond-Point des Champs-Élysées, son mentor et complice chez Artcurial lui a ainsi rendu hommage devant ses équipes en larmes : « L’honneur d’un chef d’entreprise réside dans l’exemplarité et la transmission, il incarnait ces deux valeurs. L’émotion suscitée par sa disparition est ici à la hauteur de son immense humanité. La porte de son bureau était toujours ouverte et quand j’y rentrais, il se levait pour me serrer dans ses bras. Artcurial lui a permis de s’accomplir. Nous pouvons tous témoigner qu’il y était très heureux. »

Né le 27 juin 1962 à Évreux (Eure), il devient régisseur dans le cinéma en 1986, commissaire-priseur associé chez Tajan en 1998, co-président chez Artcurial en 2005, et Président délégué d’Artcurial en 2015. Marié et père de trois enfants, comme le racontent si bien les journalistes du Figaro Béatrice de Rochebouet et Valérie Sasportas, François Tajan ne voulait surtout pas être un fils de … et se retrouver dans l’ombre de Jacques Tajan, personnalité écrasante, figure militante du marché de l’art. François rêvait de faire du cinéma. Après des études de droit, il devint ainsi stagiaire régie pour le film Hôtel de France de Patrice Chéreau. Son aventure dans le septième art dura plus de quatre ans. À l’âge de 28 ans, François Tajan avait fini par embrasser la carrière familiale en s’associant à son père. Il prend son envol en 2004, et rejoint Artcurial, sur la proposition de Nicolas Orlowski, son PDG. « J’ai pris le meilleur élément de chez Tajan, je l’ai exfiltré, en gardant son nom apposé à la marque Artcurial ! » Une décision pas si évidente à assumer alors que le nom de son père s’affiche non loin de Drouot. Tellement convaincu par cet homme si élégant et généreux, Nicolas Orlowski le nommera président délégué. « Nous avons eu une relation de binôme simple, saine, transparente, très rare dans ce monde aux ego surdimensionnés du marché de l’art ». Les mêmes mots reviennent à tous les étages de la maison Artcurial : “bienveillance”, “élégance”, “délicatesse”, “gentillesse”, “courage”, “énergie”.

Le conseil d’administration de la Fondation du Rein présente ses condoléances les plus attristées à son épouse Véronique, à ses trois enfants, ainsi qu’à ses collaborateurs d’Artcurial. Les obsèques de François Tajan ont eu lieu à la Basilique Sainte-Clothilde à Paris le mardi 3 mars 2020.

 

Dr Brigitte Lantz, Secrétaire générale de la Fondation du Rein

Hommage au Pr Jean-Daniel Sraer (1937-2019)

Jean-Daniel Sraer naquit en 1937 dans une famille juive ashkénaze et resta toute sa vie profondément attaché au Judaïsme et à Israël. La victoire allemande de 1940 amena sa famille à s’installer à Alger. Revenu en France à la libération, il décida comme sa sœur, de s’inscrire à la Faculté de médecine à la fin de ses études au lycée. Reçu à l’internat et après un service militaire en Algérie, il commença sa vie de médecin dans les hôpitaux parisiens.

C’est Gabriel Richet qui le fit devenir néphrologue et lui fit comprendre qu’il n’était pas de carrière universitaire sans mener de pair soins aux malades et recherche au laboratoire. Il fut un des élèves préférés de Gabriel Richet auquel le liait un profond attachement parce que tous deux partageaient des traits communs de caractère : franchise et liberté dans les propos, goût pour l’enseignement au lit du malade, nécessité d’un service de néphrologie pluridisciplinaire en relation étroite avec une unité INSERM incluant anatomopathologistes, physiologistes et chercheurs statutaires et universitaires, désir d’aider au mieux leurs élèves dans leur vie professionnelle.

Il passa à Tenon toute sa carrière comme chef de clinique, assistant, professeur de néphrologie, puis chef de service de néphrologie à la retraite de Gabriel Richet auquel il succéda. Son service recevait essentiellement deux types de patients, ceux atteints d’insuffisance rénale aiguë et ceux arrivés au stade d’insuffisance rénale chronique avancée traités par transplantation rénale. Jean-Daniel Sraer acquit la réputation d’un expert dans ces domaines.

Parmi toutes les études cliniques qu’il publia, on peut citer celles sur le syndrome urémique et hémolytique de l’adulte et toutes celles sur la physiologie, l’histologie et les infections virales du greffon ainsi que les diverses modalités de traitement immunosuppresseur. Son activité de recherche occupait une part importante de son temps. Il la poursuivait dans l’Unité de néphrologie que dirigèrent successivement Gabriel Richet, Raymond Ardaillou et Pierre Ronco. Il se préoccupait toujours de mettre au point de nouvelles techniques, d’imaginer des voies de recherche originale et de stimuler l’équipe qu’il dirigeait afin d’essayer de prouver le bien-fondé de ses hypothèses.

Avec Raymond Ardaillou, il fut le pionnier des études physiologiques in vitro des glomérules isolés et des cellules glomérulaires mésangiales et épithéliales en culture prouvant que la physiologie du glomérule était plus complexe qu’on le pensait alors, cette petite touffe de capillaires étant la cible d’hormones régulant son activité et la source de médiateurs chimiques agissant in situ. Ces recherches ont eu une profonde influence sur l’utilisation des inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine chez les malades insuffisants rénaux. Il étudia aussi les processus de formation des thrombi dans les capillaires glomérulaires étroitement liée au système fibrinolytique dont les éléments essentiels sont les activateurs du plasminogène et leurs inhibiteurs. Son dernier travail fut la découverte d’un récepteur de la rénine et l’analyse des fonctions de cette protéine. Il cherchait toujours à impliquer ses internes dans des travaux de laboratoire pour leur donner le goût de la recherche.

Son épouse, Josée Sraer, MCU-PH de physiologie travaillait aussi au laboratoire dans l’équipe dirigée par Raymond Ardaillou et participa avec eux deux à ces recherches. Il forma de nombreux néphrologues dont Eric Rondeau, Marie-Noëlle Péraldi et Alain Kanfer qui furent ses assistants. Son service et son laboratoire accueillirent des étudiants et des chercheurs étrangers qui lui restèrent toujours reconnaissants de son accueil et de son enseignement.

Il souhaita, à sa retraite, conserver une activité médicale, ce que lui permit son élection à l’Académie. Tous ses confrères étaient admiratifs de la pertinence des questions qu’il posait après l’écoute de rapports ou de présentations par des invités.

Nous nous sommes rencontrés à l’Hôpital Tenon, il y a cinquante et quarante ans, et nous n’avons quitté cet hôpital, ni l’un ni l’autre, jusqu’à notre retraite. Nous avons pu apprécier ainsi sa fidèle amitié, l’imagination créatrice dont il faisait preuve dans ses recherches, l’humanité de ses contacts avec ses patients et le désir qu’il avait de les traiter au mieux de ses possibilités, le courage dans les épreuves, et plus que tout sa générosité. Jean-Daniel avait une très profonde affection et admiration pour sa famille, et c’est tout particulièrement à elle que nous pensons en ces jours.

Pr Raymond Ardaillou et Pr Pierre Ronco, de l’Académie nationale de médecine

Hommage au Pr François Berthoux (1942-2019)

C’est avec une grande tristesse que nous avons appris le décès de notre collègue et ami, le Professeur François Berthoux, le 6 février 2019.

 

François Berthoux a été l’un des pionniers de la néphrologie et a fondé l’Ecole de Néphrologie à Saint-Etienne.

Ces travaux, notamment, autour de la néphropathie à dépôts mésangiaux d’IgA ont permis de mieux comprendre la physiopathologie de cette maladie et son traitement. Il a, à titre personnel, été confronté à la maladie qu’il a combattu avec un grand courage. Nos pensées vont bien sûr à son épouse et à sa famille, mais aussi aux collègues de Saint-Etienne qui ont travaillé à ses côtés pendant de nombreuses années.

 

Pr Gabriel Choukroun

Hommage à Monsieur Serge Dassault (1925-2018)

La disparition de Serge Dassault le 28 mai 2018 est tout d’abord une grande perte pour sa famille, son épouse Nicole, ses quatre enfants, Olivier, Laurent, Thierry et Marie-Hélène, et ses nombreux petits-enfants, à qui le conseil d’administration de la Fondation du Rein transmet toutes ses pensées attristées les plus chaleureuses, mais elle l’est aussi pour son groupe industriel, et aussi pour la France.

Conscient que l’entreprise est un acteur à part entière de la société civile et qu’à ce titre elle a une véritable responsabilité sociale, le Groupe Dassault mène depuis de nombreuses années une politique de mécénat. Serge Dassault ajoutait même : « S’engager dans le mécénat et aider la recherche n’est pas un devoir, c’est un choix : celui de la raison, certes, mais surtout celui du cœur. » Ainsi, en dehors de ses fonctions de capitaine de l’industrie française et de parlementaire, Serge Dassault cherchait à aider à chaque fois qu’il le pouvait et soutenait de belles causes comme celle de la Fondation du Rein et bien d’autres, toujours avec générosité et discrétion. Il était un visionnaire et un modèle pour beaucoup.

Nous n’oublierons jamais sa présence à nos côtés et son soutien sans faille pour la Fondation du Rein, dont son fils Thierry Dassault est notre vice-président. Nous associons à cet hommage son épouse Nicole, qui n’a eu de cesse, elle-aussi, de nous aider. Elle nous a quittés en 2019.

 

Dr Brigitte Lantz, Secrétaire générale de la Fondation du Rein

Hommage au Pr Michel Olmer (1934-2017)

Le 22 juin 2017, le professeur Michel Olmer nous a quittés dans sa quatre-vingt-troisième année, au terme d’une éprouvante maladie qu’il a affrontée avec courage et dignité. Michel Olmer fait partie des pionniers et des piliers de la néphrologie, qui ont fortement contribué au développement et au rayonnement de la discipline tant en France qu’à l’étranger. Après de brillantes études médicales à Marseille, il a rapidement gravi tous les échelons de la carrière hospitalo-universitaire, successivement externe (1954), interne (1958), puis chef de clinique (1960) des hôpitaux de Marseille. Michel Olmer fut admis au concours de professeur des universités-praticien hospitalier en 1970 et dirigea finalement le service de néphrologie du CHU de Marseille de 1973 à 2000.

Michel Olmer était passionné par la clinique et les soins aux patients. Il était un médecin humaniste par formation et dans l’âme. La recherche clinique l’avait séduit. Il avait des thèmes de prédilection tels l’hypertension, la maladie lithiasique, les maladies cardiovasculaires urémiques, les désordres métaboliques et osseux de l’insuffisance rénale, mais également les complications métaboliques au sens le plus large de l’urémie chronique. De façon plus récente, il s’était fortement impliqué dans l’éducation thérapeutique des patients, notamment en développant des ouvrages extrêmement didactiques dont le plus fameux restera Vivre avec une maladie des reins.

Dans le contexte historique et pionnier des années 1970, Michel Olmer avait rapidement identifié le besoin et l’intérêt de développer la dialyse comme suppléance de l’insuffisance rénale chronique ultime. À cet effet, il créa le service de néphrologie à l’hôpital de La Conception, à Marseille, qui devint rapidement le centre de référence du Sud-Est. À partir de ce dernier, il essaima de nombreuses unités satellite de dialyse dans le cadre de son association pour le traitement des urémiques en Provence-Corse.Michel Olmer avait à cœur de former et de s’entourer de collaborateurs talentueux dont le plus célèbre est le professeur Yvon Berland. Il avait établi un lien particulier avec les pays du Maghreb (Maroc, Tunisie et Algérie), dont il contribua à former une bonne partie de ses élites. Au cours de sa carrière, Michel Olmer a également su tisser des liens professionnels et d’amitiés dans le milieu néphrologique, lui permettant d’établir un vaste réseau national et international. Cette volonté permanente d’aller de l’avant et son sens de l’organisation lui permirent de réaliser de nombreuses réunions scientifiques et pédagogiques dont la qualité n’avait d’égal que la convivialité dans laquelle elles se déroulaient.

Michel Olmer était fidèle en amitié, généreux par nature, fougueux et impulsif par tempérament. Il restera pour beaucoup d’entre nous l’ami qui a su nous faire découvrir les vraies valeurs de la vie et nous initier à la légendaire amitié marseillaise. Certainement, Michel va nous manquer, mais il restera dans nos cœurs, son esprit nous inspirera et son exemplarité dans l’action continuera de nous animer dans le combat pour la vie contre les maladies rénales.

À son épouse, ses filles, ses gendres et petits-enfants, nous exprimons nos plus sincères condoléances et les assurons de notre très profonde amitié dans ces moments particulièrement difficiles.

Pr Bernard Canaud

Hommage au Pr Jean-Paul Fillastre (1934-2018)

Le professeur Jean-Paul Fillastre nous a quittés le 19 septembre 2018 à l’âge de 84 ans.

Jean-Paul Fillastre est né au Havre en 1934 dans une famille de marins. Son grand-père était capitaine d’un “terre-neuvas” et son père “pilote du Havre”. Pendant les vacances scolaires suivant l’année du baccalauréat, il s’embarque comme “pilotin” sur un bananier reliant Le Havre à la Guadeloupe. L’expérience ne dût pas être concluante puisqu’à son retour, il s’inscrit à l’École de Médecine de Rouen. Les patrons rouennais l’incitent à passer le concours de l’Externat de Paris. Il devient Externe puis Interne des Hôpitaux de Paris. Jean-Paul Fillastre s’oriente alors vers la gastro-entérologie, part aux Etats-Unis et s’initie à l’électromanométrie digestive au John Hopkins Hospital de Baltimore. Au cours de son internat, Jean-Paul Fillastre souhaite compléter sa formation dans un domaine dont la compréhension est récente et qui est fréquemment rencontré en gastro-entérologie : les troubles hydro-électrolytiques. Le sixième semestre d’internat se passe donc dans le service du Professeur Gabriel Richet, alors secondé de deux assistants : Raymond Ardaillou et Claude Amiel. Au contact de tels maîtres, passionnés par la recherche, Jean-Paul Fillastre est vite séduit par cette nouvelle discipline. Son orientation définitive devient la Néphrologie. Il réalise un stage de Médaille d’Or dans le service du Professeur Jean Hamburger, puis son clinicat à l’hôpital Tenon dans le service du Professeur Richet.

Appelé à exercer des fonctions hospitalo-universitaires, Jean-Paul Fillastre choisit alors de venir créer un service de Néphrologie à Rouen. Il prend ses fonctions en septembre 1970. A cette date, il n’y a pas de centre de dialyse en Normandie. Son premier objectif est donc de créer une unité d’hémodialyse puis de contribuer à l’ouverture d’autres centres dans la région. Par la suite, il n’aura de cesse d’obtenir un rééquilibrage de la “carte sanitaire” afin d’offrir en Haute-Normandie des possibilités de dialyse équivalentes à celles des autres régions.

Dès son arrivée à Rouen, Jean-Paul Fillastre souhaite rajouter à l’activité néphrologique classique une orientation plus spécifique : il crée avec ses collègues cardiologue et endocrinologue une consultation multidisciplinaire d’Hypertension Artérielle. Jean-Paul Fillastre continuera à s’intéresser de près à cette pathologie pendant toute sa carrière. Il deviendra en 1996 Vice-Président de la Société d’Hypertension Artérielle.

En 1970, l’Ecole de Médecine de Rouen est devenue Faculté mais c’est une toute jeune faculté. Les activités de recherche sont encore très limitées. Raymond Ardaillou a transmis à Jean-Paul Fillastre le virus de la Recherche. Très vite, il se rapproche de ses collègues de la Faculté des Sciences et crée un Groupe de Recherche de Physiopathologie tissulaire. La thématique est originale : la néphrotoxicité des antibiotiques et notamment celle des aminosides. Il obtiendra dans ce domaine une réputation internationale et organisera à Rouen deux congrès internationaux sur ce thème. Il obtient début 86 la création de l’Unité INSERM U 295 “Physiopathologie et génétique rénale et pulmonaire”. L’intérêt de l’équipe s’élargira ensuite à la toxicité rénale des médicaments anticancéreux et au développement de méthodes alternatives à l’expérimentation animale.

Jean-Paul Fillastre était aussi un enseignant passionné. Les étudiants appréciaient la clarté et le dynamisme de ses cours magistraux. Il était très proche des étudiants et insistait pour participer lui-même aux enseignements par petits groupes. Jean-Paul Fillastre aimait animer des enseignements post-universitaires, notamment sur l’hypertension artérielle. A l’affût de toute nouveauté, Jean-Paul Fillastre se passionne pour les innovations pédagogiques. Il participe activement à la mise en place de l’enseignement par petits groupes (APP) à la faculté de médecine de Rouen. En tant que Président de la Commission Pédagogique de la faculté, il accomplit un énorme travail de révision des programmes d’enseignement. Il devient à la fin de son activité un farouche partisan de la Lecture Critique d’Article. Jean-Paul Fillastre a su transmettre à ses collaborateurs, universitaires ou non, cette passion de l’enseignement. Le service de néphrologie était reconnu pour la qualité de la formation qui y était dispensée, attirant ainsi les étudiants hospitaliers, les internes d’autres spécialités, suscitant de nombreuses vocations de néphrologues et formant de nombreux élèves. Jean-Paul Fillastre a participé à de nombreux enseignements à l’étranger mais c’est avec ses collègues tunisiens (professeurs Hassouna Ben Ayed et Hédi Ben Maiz) qu’il tissera les liens les plus solides. Des conventions existent entre les hôpitaux Charles Nicolle de Tunis et de Rouen et pendant de longues années, le service de néphrologie a eu le bonheur d’accueillir de nombreux internes tunisiens dont la compétence faisait à chaque fois l’admiration de tous. Beaucoup d’entre eux ont fait, par la suite, une brillante carrière en France ou en Tunisie.

Il serait trop long d’évoquer toutes les fonctions administratives qu’a assuré Jean-Paul Fillastre au plan régional ou national, aussi bien dans le domaine hospitalier qu’universitaire. Mais on doit rappeler ici le rôle essentiel qu’il joua en tant que Président de la Société de Néphrologie. Nous sommes au milieu des années 80. Les réunions de la Société sont principalement faites de communications libres, sur des thèmes le plus souvent fondamentaux. Jean-Paul Fillastre devient Président en 1986. Il souhaite une ouverture de la Société vers l’ensemble des néphrologues. Il propose de nouveaux statuts, un remaniement du Conseil d’Administration, la création de Commissions et d’allocations de recherche et surtout une nouvelle organisation des réunions annuelles avec conférences, ateliers, séances de communications libres et de mises au point. Tout ne se fait pas sans quelques réticences mais la première réunion à lieu à La Cité des Sciences de la Villette en octobre 1989 et c’est un grand succès. La Société lui rendra hommage en 2002 en lui remettant, en même temps qu’à H. Ben Ayed, la première médaille Jean Hamburger.

Jean-Paul Fillastre possédait un enthousiasme communicatif et un charisme simple et naturel. Il était doué d’une formidable efficacité dans le travail ce qui lui a permis de mener de front les nombreuses activités évoquées plus haut et de trouver encore du temps pour se consacrer à son activité sportive préférée : le golf. Seule la neige, heureusement rare en Normandie, pouvait le priver de son parcours de golf hebdomadaire.

Jean-Paul Fillastre était surtout un homme d’une très grande générosité. Il était toujours prêt à aller voir un patient ou à recevoir une famille inquiète. Il savait être à l’écoute des plus jeunes pour conseiller l’orientation d’une carrière. Il était attentif aux soucis des uns et des autres, du personnel de son service comme des membres de l’équipe médicale ou de l’équipe de recherche. Nombreux sont ses amis, ses collègues qui se souviennent d’avoir reçu sa visite ou un petit mot écrit de sa belle écriture à l’occasion d’un événement heureux ou au contraire d’un souci personnel ou familial.

Comme l’ont montré les innombrables messages adressés après son décès, tous ses amis, ses collègues, ses élèves de France et de Tunisie auraient aimé se réunir pour lui rendre un dernier hommage. Jean-Paul Fillastre était un homme simple, il avait émis le souhait que ses obsèques aient lieu dans la plus stricte intimité familiale.

La communauté néphrologique le remercie vivement pour toute la contribution qu’il a apportée au développement et au rayonnement de sa discipline.

Pr Michel Godin

Hommage au Pr Nguyen-Khoa Man (1932-2017)

Le Conseil d’administration de la Fondation du Rein a la tristesse de vous faire part de la disparition brutale du Professeur Nguyen-Khoa Man le 1er janvier 2017 dans sa 85ème année. C’est un grand nom de la néphrologie française et internationale qui disparaît avec lui.

Né en 1932, le Professeur Nguyen-Khoa Man est issu d’une grande famille de Huế, d’une dynastie qui a façonné le Vietnam. Dès l’âge de sept ans, il passe ses cinq premières années d’études à l’internat du Collège de la Providence dirigé par les Pères des Missions Étrangères de Paris, où il acquiert une méthode de travail et une rigueur de raisonnement, qu’il associera toute sa vie à la tolérance et à l’humanisme.

Il décide d’entreprendre des études de médecine à Paris en 1950 et épouse une jeune puéricultrice française, Yvette. Rentré à Huế en 1960 pour exercer sa profession à l’Hôpital Central de la Cité impériale où il devient Médecin-Chef du service de Médecine, alors que débute la guerre du Vietnam. Il choisit la néphrologie, cette toute jeune spécialité particulièrement innovante pour l’époque, ce qui correspond à son esprit inventif et créatif. En 1963, il devient chargé de cours de Physiologie et de Médecine à la Faculté de Médecine de Huế, nouvellement créée en partenariat avec la Faculté de Médecine de Fribourg-en-Brisgau en Allemagne. En 1965, il bénéficie d’une bourse qui lui permet d’intégrer l’équipe de médecine interne et de néphrologie du Pr J. Schirmeister à la Clinique Universitaire de Fribourg, où il s’initie à la recherche médicale et son application clinique. À la suite des événements tragiques du Têt Mâu Thân en janvier 1968, où les professeurs allemands de la Faculté de Médecine de Huê sont assassinés, le gouvernement vietnamien rappelle les enseignants boursiers pour les remplacer. Par sécurité, NK Man décide d’emmener sa famille en France ; il obtient un poste de médecin vacataire à l’Hôpital Necker dans le service de néphrologie du Pr Jean Hamburger le 1er juillet 1968, où il participe avec le Pr Gabriel Richet aux travaux du premier rein artificiel français et à ceux de la première membrane de dialyse à haute perméabilité au monde. Ces avancées technologiques permettent dès 1972 de raccourcir la durée des séances de dialyse, à quatre heures trois fois par semaine. Il devient Directeur du Laboratoire de Recherche sur le Rein Artificiel à l’Hôpital Necker en 1969.

Puis, il intègre la Commission Nationale de Transplantation et de Dialyse au Ministère de la Santé, devient Président de la sous-commission d’Homologation « Épuration extra‑rénale et Hémaphérèse » en 1983 et Président de la sous-commission « L’eau et l’infection dans les Centres de Dialyse » en 1986. Il participe ainsi jusqu’à 2004 aux différents travaux ministériels concernant la réglementation des structures de dialyse en France, de l’eau de dialyse, et des dispositifs médicaux utilisés en dialyse, notamment pour la biocompatibilité des membranes.

En 1973, il est nommé, par décret présidentiel, Professeur associé des Universités en néphrologie par Georges Pompidou. Puis, il est nommé en 1977 Directeur de recherche à l’INSERM où il effectuera le reste de sa carrière. Fervent défenseur de la dialyse quotidienne, il est à l’origine de la prise de conscience de ses bienfaits par les pouvoirs publics, et de son application clinique ces dernières années.

Le Professeur Nguyen-Khoa Man a voué pendant toute sa vie une profonde reconnaissance à ses maîtres, les professeurs Jean Hamburger, Jean Crosnier et Jean-Louis Funck-Brentano, et à ses amis les professeurs Paul Jungers et Jean-Pierre Grünfeld. Il gardait une grande admiration pour la Médecine française et la France qui l’avait accueilli.

La Société Francophone de Dialyse lui a attribué en 2012 la Médaille Belding H. Scribner.

Il laisse le souvenir d’un grand visionnaire, pionnier de la néphrologie française et de la dialyse, et d’un homme très attachant, empreint de sagesse orientale et d’humanisme.

Ses cinq enfants ont tous effectué des études scientifiques, Marc, chirurgien orthopédiste, Phuong médecin endocrinologue, Thao biologiste à Necker, Sophie, experte internationale en « Gestion de l’eau » et Julie, business manager en matériel biomédical.

Le Conseil d’administration de la Fondation du Rein s’associe à leur douleur et à celle de son épouse, Yvette.

Dr Brigitte Lantz

Hommage au Pr Jules Traeger (1920-2016)

La Fondation du Rein a le regret de vous faire part du décès du Professeur Jules Traeger survenu le 25 mai 2016 dans sa 97ème année. C’est un grand nom de la néphrologie française et internationale qui disparaît avec lui.

La communauté néphrologique honore la mémoire de cet homme qui fut un des leaders mondiaux de la lutte contre les maladies rénales. Professeur de Médecine à l’Université Claude Bernard en 1967, chef de service de Néphrologie de 1965 à 1986 à l’hôpital de l’Antiquaille puis à l’hôpital Edouard Herriot à Lyon, directeur de l’unité INSERM U80 de 1968 à 1984, il fut Président de la Société de Néphrologie, de la Société Française de Transplantation, de la Société Européenne de Dialyse et Transplantation, et contribua en 1960 à la création de la Société Internationale de Néphrologie. Le Professeur Jules Traeger était Professeur Emeritus de Néphrologie, Membre correspondant de l’Académie nationale de Médecine, Docteur honoris causa de nombreuses universités dans le monde entier. Il avait reçu en décembre 2003 les insignes de Commandeur de la Légion d’Honneur.

Son œuvre est immense, dans tous les domaines de la néphrologie : pionnier de l’hémodialyse chronique puis de la transplantation rénale en France dans les années 60, de la recherche sur les traitements anti-rejet avec le sérum anti-lymphocytaire en 1963, de la dialyse à domicile avec la fondation de l’Association pour l’Utilisation du Rein Artificiel à Lyon (AURAL) en 1974, de la transplantation multi-organes, il fut un promoteur infatigable des innovations thérapeutiques avec ces dernières années une contribution essentielle au développement de l’hémodialyse quotidienne.

Il était un homme curieux, exigeant, attachant et fidèle. Ses innombrables collaborateurs et élèves gardent un souvenir ému de cette brillante intelligence qui vient de s’éteindre.

Pr Maurice Laville

Hommage au Pr Gilbert Lagrue (1922-2016)

Nous avons la tristesse de vous faire part du décès du Professeur Gilbert Lagrue, survenu le 11 novembre 2016 à l’âge de 93 ans. Nommé interne des hôpitaux de Paris en 1950, puis devenu chercheur à l’Institut national d’Hygiène, le Professeur Lagrue a été nommé Professeur des Universités au premier concours de la réforme Debré en 1961.

Néphrologue à l’hôpital Broussais dès 1961, puis chef de service de Néphrologie-Dialyse-Transplantation à l’hôpital Henri-Mondor à Créteil, il exerce une activité de recherches clinique et expérimentale à l’Inserm, comme directeur de l’unité de recherche “Hypertension artérielle” de 1966 à 1973 et de l’unité de recherche “Néphropathies expérimentales et humaines” de 1971 à 1984. Professeur des universités et Praticien hospitalier, il poursuit l’étude des maladies rénales et de l’hypertension artérielle, en se focalisant sur la prévention du risque vasculaire. C’est ainsi qu’il construit la fonction médicale d’aide au sevrage tabagique pendant les vingt-cinq ans qui suivent. Sa capacité d’écoute des personnes malades s’est exercée pendant tout ce temps, de la pédiatrie à l’addictologie dont il développe le versant du tabagisme. La bienveillance, la curiosité intellectuelle et la passion de la recherche ont caractérisé ces années de travail permanent.

Ses contributions majeures, marquées par l’originalité de la question posée, le soin du lien créé entre la caractérisation des malades et le travail expérimental, sont internationalement reconnues  du Japon aux Etats-Unis. Il a favorisé une recherche allant de la génétique et de la pharmacologie à la psychopathologie et à la santé publique, a structuré l’approche clinique des personnes sévèrement dépendantes du tabagisme ou déjà victimes de ses conséquences, en prenant mieux en compte et simultanément les multiples facettes psychologiques et pharmacologiques de cette dépendance.

Quand vint l’heure de son départ officiel en retraite, Gilbert Lagrue a eu la jeunesse d’esprit, l’enthousiasme et la conscience du service à rendre par la médecine, en faisant pendant vingt-cinq ans un nouveau métier : l’aide au sevrage tabagique. Sa contribution apportée à la médecine, reconnue par l’ensemble de la communauté hospitalière, est remarquable par sa qualité et par sa durée exceptionnelle, de 1950, date de sa nomination à l’Internat, à 2013, date de la publication de son dernier livre. Il publie ainsi, à l’âge de 91 ans, un ouvrage sur le vieillissement, “Bien vieillir, c’est possible, je l’ai fait”, et prodigue des conseils sur les trois piliers du “bien vieillir” : activité physique, nutrition et bannissement du tabac.

Le Professeur Gilbert Lagrue a souhaité que les Sociétés de Néphrologie et de Tabacologie réfléchissent ensemble en 2017 sur le futur des malades qui les concernent, et sur les avancées de la recherche exercée dans toute sa capacité de translation entre les disciplines scientifiques, sociales et médicales.

Dr Brigitte Lantz

Hommage à Régis Volle (1944-2015)

Nous avons la tristesse de vous informer de la disparition de notre ami Régis Volle, survenue le 16 avril 2015 à l’âge de 71 ans. Pharmacien et ancien maire de 1989 à 2001 de Vernaison, Régis Volle était le Président d’Honneur et le Fondateur de la Fédération nationale d’aide aux insuffisants rénaux (FNAIR). C’est l’une des toutes premières associations de patients, née en 1972 à une époque où les patients avaient peu la parole.

Régis Volle était bien plus que le fondateur de la FNAIR qu’il a présidée pendant 40 ans. Il a été à l’origine de la prise de conscience des pouvoirs publics et peut-être du corps médical du rôle des patients dans la prise en charge de l’Insuffisance rénale chronique. Il n’avait peur d’aucun ministre, d’aucun directeur d’hôpital, d’administration centrale ou d’agence de santé, d’aucun professeur de médecine, et savait manier la diplomatie, mais en restant déterminé à faire progresser ses idées. Par son travail, son audace et son acharnement, il a su créer une dynamique contribuant à révolutionner la prise en charge des personnes atteintes d’insuffisance rénale chronique. Ainsi avec la FNAIR, il a multiplié les combats pour améliorer le sort des malades : installation de centres de dialyses sur tout le territoire, développement de la dialyse à domicile et de l’autodialyse, prise en charge du forfait accompagnant pour la dialyse péritonéale… Alors qu’à la fin des années 80 est introduite l’érythropoïétine (EPO) que les pouvoirs publics veulent réserver à quelques patients dont le choix serait fait par un comité régional d’experts, il décide de mener un véritable combat pour que ce nouveau traitement de l’anémie soit pris en charge pour tous ceux qui en ont besoin. En 1999, il insiste sur l’importance de la qualité de l’eau utilisée en dialyse, et plus particulièrement pour l’hémodiafiltration et l’hémofiltration en ligne, ce qui conduira à la rédaction d’un guide de bonnes pratiques sur l’eau de dialyse et d’une circulaire ministérielle pour en préciser la définition et la réglementation. En 2000, il contribue à l’élaboration du premier Plan Greffe 2000.

Régis Volle avait surtout l’art de fédérer les personnes de bonne volonté pour mener à terme ses projets. C’est lui aussi qui a eu l’idée de créer International Dialysis Organisation (IDO), afin de faciliter les déplacements des patients dialysés qu’il voulait voir libres et en mesure de réaliser leurs rêves de vacances et de voyages, ces mêmes rêves qu’il avait lui-même réalisés, qui a créé la Journée nationale de l’Insuffisance rénale chronique en 2001, précurseur de la Journée Mondiale du Rein à l’échelon national, afin de sensibiliser les pouvoirs publics et la société sur l’insuffisance rénale chronique, qui a conduit à l’écriture du Programme national d’action 2001-2004 Insuffisance Rénale Chronique et des décrets de 2002 qui organisent aujourd’hui la dialyse en France, fortement inspirés par le « Livre Blanc de la FNAIR ». C’est encore lui qui a créé en 2006 la Semaine du Rein, afin de sensibiliser le public sur la prévention et la détection précoce des maladies rénales. Régis fut aussi l’un des fondateurs de la Fondation du Rein en 2002.

Nous admirions son courage, sa détermination, son dévouement à la cause des maladies rénales et des patients, et son sens de l’humour et de l’autodérision. Il nous nous laisse aussi le souvenir d’un homme qui s’est battu avec acharnement toute sa vie contre la maladie, même en se faisant dialyser sur son voilier pour traverser les mers qu’il aimait tant. Cette force faisait l’admiration de tous et lui a permis d’apprendre à ses « collègues-patients » tout simplement à vivre avec leur maladie.

Nous nous souvenons aussi de la flamme qui brillait dans ses yeux quand, entre deux projets, il nous parlait avec admiration de ses enfants, Daphné et Florian, et avec tendresse de ses petits-enfants Nathan, Thomas et Amelys, en ponctuant parfois la conversation par un : « J’ai la chance de pouvoir compter sur mon épouse Edith ».

A son épouse, ses enfants et petits-enfants, et ses proches, la Fondation du Rein adresse ses condoléances attristées. Les obsèques de Régis Volle ont eu lieu le 23 avril 2015 en l’église de Charly, près de Lyon.

 

Dr Brigitte Lantz

Hommage au Pr Gabriel Richet (1916-2014)

 

 

A l’occasion du Gala de la Fondation du Rein, dans le cadre de la Journée Mondiale du Rein, le Professeur Pierre Ronco, vice-président de notre Fondation, a rendu un chaleureux et vibrant hommage au Professeur Gabriel Richet le 26 mars 2015 Salle Gaveau, au nom de la communauté néphrologique française et internationale.

Un géant de la néphrologie nous a quittés

Né en 1916, le Professeur Gabriel Richet nous a quittés le 10 octobre 2014. Il représentait la quatrième génération d’une lignée illustre de médecins, tous professeurs à la Faculté de médecine de Paris, dont son grand père, le Pr Charles Richet auquel le Prix Nobel fut décerné en 1913 pour la découverte de l’anaphylaxie. Pionnier de la néphrologie française, grand résistant pendant la seconde guerre mondiale comme plusieurs membres de sa famille, il créa avec le Pr Jean Hamburger la néphrologie française, d’abord à l’Hôpital Necker, puis à l’Hôpital Tenon (AP-HP).

Il fut un membre fondateur de la Société Internationale de Néphrologiesecrétaire général du premier congrès mondial de néphrologie à Genève et Evian en 1960, président de la Société Internationale de Néphrologie de 1981 à 1984. Il a participé à la création de la Fondation du Rein tant il voulait développer la recherche sur les maladies rénales, notamment la recherche translationnelle. Parmi d’autres nombreuses récompenses et Doctorats Honoris Causa, il fut le lauréat du prestigieux Prix Jean Hamburger de la Société de Néphrologie en 1993. Gabriel Richet est Grand Officier de la Légion d’Honneur.

Ses obsèques religieuses ont eu lieu le 16 octobre 2014 en l’église Saint-Sulpice à Paris. Un grand nombre de personnalités du monde entier sont venues lui rendre hommage.

Vous pouvez lire la biographie in memoriam du Professeur Gabriel RICHET en cliquant sur le document ci-dessous.

Éloge de Gabriel RICHET (1916-2014)

par le Pr Raymond ARDAILLOU

Secrétaire perpétuel honoraire de l’Académie nationale de médecine

Monsieur le Président, Monsieur le Secrétaire perpétuel,

Chers confrères et chères consœurs,

Mesdames, Messieurs

“Pour raconter sa vie, il faut avoir vécu”. C’est ainsi que commence “Les confessions d’un enfant du siècle”. Musset voulait, par-là, opposer les hommes qui avaient eu 20 ans en 1789 et pu vivre les événements de  la Révolution et de l’Empire à ceux qui avaient atteint le même âge au début de la Restauration, 30 ans plus tard, dont la seule ambition était de faire fortune. Gabriel Richet eut 20 ans en 1936. La guerre d’Espagne commençait. Il allait connaître la guerre, l’occupation, la guerre de nouveau et, enfin, la reconstruction du pays. Sa famille fixée à Paris depuis le milieu du 19ème siècle compte une lignée de trois professeurs à  la Faculté de médecine de Paris qui ont, chacun, marqué leur époque. Le portrait d’Alfred Richet, l’arrière-grand-père, chirurgien des hôpitaux, domine le grand escalier de l’École de médecine et le montre soignant les blessés du siège de Paris en 1871. Le grand père, Charles Richet, physiologiste de renom, découvrit l’anaphylaxie, fut lauréat du Prix Nobel en 1913, événement dont l’Académie a célébré le centenaire en présence de son petit-fils. Âgé de 19 ans à sa mort, Gabriel Richet fut profondément influencé par son grand-père qui l’orienta vers une médecine basée sur des connaissances scientifiques apportées par l’expérimentation. Son père, enfin, Charles Richet fils, médecin des hôpitaux de Paris, fut déporté à Buchenwald par les allemands. A son retour, il étudia les conséquences de la dénutrition chez ses compagnons de captivité. Du côté maternel, la famille Trélat participa également à l’histoire de notre pays. Gabriel Richet a rejoint dans son tombeau au Père Lachaise Ulysse Trélat, vice-président de l’Assemblée constituante, puis ministre des travaux publics en 1848.

La vie de Gabriel Richet peut être examinée sous trois aspects : le militaire, patriote au service de son pays, le médecin et chercheur, le chef d’une école de néphrologie.

Sa carrière militaire commença en septembre 1939 lorsque débuta la deuxième guerre mondiale, quelques mois après sa nomination à l’internat des hôpitaux de Paris. Médecin auxiliaire, il prit part à la Campagne de France. Il y montra dévouement et  courage, ce qui lui valut d’être cité à l’ordre de son régiment et d’être décoré de la Croix de Guerre. Fait prisonnier, il fut libéré, étant médecin, en application des conventions de Genève, après quelques semaines de captivité et rentra à Paris occuper les fonctions d’interne. Toute sa famille participa à la résistance contre l’occupant. J’ai déjà dit que son père fut déporté à Buchenwald ; son frère, Olivier, le fut aussi à Buchenwald, puis à Dora et, enfin, à Bergen Belsen et sa cousine, Jacqueline Richet-Souchère à Ravensbrück. Ils racontèrent à leur retour leurs vies dans ces camps dans un livre intitulé “Les trois bagnes”.  Sa mère, Marthe Richet, fut emprisonnée quelques mois à Fresnes. Lui-même s’impliqua dans des actions de résistance. Il s’engagea dès la libération dans l’Armée qui, sous le commandement du Général Leclerc libéra Strasbourg en novembre 1944. Durant tout le début de l’année 1945, les combats continuèrent autour de la poche de Colmar. Gabriel Richet y participa comme médecin du 4ème commando de France. Il fut blessé d’une balle à la cuisse à Durrenentzen, hospitalisé pendant 2 mois et retourna au Commando au moment où il traversait le Rhin. Il participa de nouveau aux combats jusqu’à l’armistice. Il fut cité trois fois à l’ordre de l’Armée et décoré de la Légion d’Honneur par le Général de Gaulle en avril 1945 à Karlsruhe. Gabriel Richet revenait régulièrement à Durrenentzen aux réunions des anciens du commando. Il se considérait selon ses propres termes comme “un alsacien de passage” et restait très attaché à cette région du Haut Rhin.

La médecine resta toute sa vie la passion de Gabriel Richet. Dès le départ, il fut persuadé qu’il fallait sortir d’une médecine purement descriptive sans aucune base physiologique, sans aucune information chiffrée, sans données histologiques solides, sans exploration fonctionnelle. Cela lui valut au début de sa carrière, au mieux des sourires désabusés, souvent des critiques méchantes et l’absence de responsabilité hospitalière durant son clinicat. Heureusement, une nouvelle génération apparaissait, celle de la reconstruction de la médecine française qui s’inspirait largement des progrès venus d’outre atlantique. Devenu en 1951 l’adjoint de Jean Hamburger à l’Hôpital Necker, Gabriel Richet put enfin réaliser son rêve d’exercer une médecine basée sur des connaissances scientifiques. Eux deux créèrent  la néphrologie en France. Jusqu’à eux, la connaissance de la pathologie rénale se limitait aux notions que l’accumulation dans le sang des déchets azotés signait l’insuffisance rénale et que la rétention du chlorure de sodium était la cause des œdèmes. Comme l’a écrit Gabriel Richet, “Il y avait fort à faire”. Citons quelques exemples des  découvertes faites à Necker durant la décennie que Gabriel Richet y passa. Le pronostic létal de l’insuffisance rénale, qu’elle soit aiguë ou chronique ne dépend pas de l’urémie, mais des troubles hydroélectrolytiques qui l’accompagnent comme l’hyperkaliémie, l’acidose et l’hyponatrémie. Gabriel Richet fut le premier à montrer que l’eau provenant de l’oxydation des aliments était un déchet comme un autre s’accumulant au cours des anuries sous la forme de ce qu’il appelait l’eau endogène. Avec J Hamburger et J Crosnier, il conceptualisa la notion de réanimation, c’est-à-dire de suppléance des grandes fonctions métaboliques qu’il appliqua aux désordres hydroélectrolytiques, mais fut vite étendue avec succès à d’autres disciplines. Ces recherches sont analysées dans un ouvrage “Techniques de réanimation médicale et de contrôle de l’équilibre humoral” que tout nouvel interne arrivant dans le service se devait de lire aussitôt. Ces études furent permises grâce à l’acquisition des premiers appareils de laboratoire innovants, photomètre à flamme d’émission pour la mesure du sodium et du potassium, pHmètre et gazomètre pour la mesure du gaz carbonique. Un laboratoire  de service fut créé, alors jugé indispensable. Une autre découverte prémonitoire fut la mise en évidence d’une érythroblastopénie médullaire passagère dans l’insuffisance rénale aiguë réversible qui lui permit de faire l’hypothèse ultérieurement confirmée du rôle d’une hormone rénale, l’érythropoïètine,  dans la production des hématies. Il participa à la mise en route des premières méthodes de dialyse. Après l’échec de la dialyse intestinale, il passa deux mois à  Boston dans le service de John Merrill pour se familiariser avec l’usage du premier rein artificiel, l’appareil rotatif de Kolff-Brigham. De retour à Paris, il fit construire le premier rein artificiel Français et créa à Necker le premier centre d’hémodialyse, alors réservé exclusivement au traitement des insuffisances rénales aiguës. Je me souviens de l’afflux dans le service de jeunes médecins Français et étrangers venus apprendre cette nouvelle technique. Une étape majeure dans la description des maladies rénales fut la biopsie rénale d’origine danoise, vite adoptée à Necker. En même temps, il introduisit l’utilisation du microscope électronique dans l’examen de ces biopsies, ce qui aboutit aux premières descriptions, avec Paul Michielsen, des podocytes et des cellules mésangiales du glomérule. La pratique des biopsies conduisit à la description des principaux types de glomérulonéphrites  avec Renée Habib et Hyacinthe de Montera. La grande affaire du service restait la transplantation rénale. On savait déjà que l’obstacle à sa réussite était la barrière immunologique ; d’où l’espoir de l’atténuer en utilisant des transplants familiaux. L’occasion se présenta en 1952 avec la greffe d’un rein maternel chez un jeune couvreur qui avait perdu un rein unique après un traumatisme. Après trois semaines de bon fonctionnement du greffon, survinrent le rejet et la mort du patient. Sept ans plus tard, ce fut le succès lors du transplant d’un rein entre deux jumeaux hétérozygotes facilité par l’irradiation préalable du patient afin de faciliter la tolérance. Ainsi, la néphrologie était-elle créée en France. L’ancienne Société de pathologie rénale devenait Société de Néphrologie en 1959. Ce changement de nom signifiait que la physiologie, l’anatomie pathologique, l’immunologie, la biologie cellulaire y avaient leurs places à l’égal de la clinique. Gabriel Richet en fut le président pendant deux ans. Il  participait également  aux activités du club des treize qui réunissait plusieurs services parisiens de disciplines diverses dont les responsables étaient tous soucieux de promouvoir une médecine scientifique.

L’année 1961 fut celle de l’indépendance et de nouvelles responsabilités. Gabriel Richet voulait créer sa propre école et former  ses propres élèves. Il prit un service de médecine générale à l’hôpital Tenon qu’il transforma en service de néphrologie. Ce ne fut pas facile. L’hôpital était dans un état de décrépitude depuis de nombreuses années ; l’équipement de base manquait cruellement, les services environnants se limitaient à la pratique clinique, les facilités de recherche étaient nulles et l’équipe médicale se bornait au seul assistant que j’étais. Le programme réalisé en 4 ans fut de créer un laboratoire de recherche avec 2 secteurs, la physiologie et l’anatomie pathologique rénale, de faire bâtir un nouveau service, d’organiser l’enseignement de la néphrologie et de recruter des élèves. Les deux premiers furent  Claude Amiel qui, avec moi, installa un laboratoire de physiologie et mena à bien un programme de recherches fait au début uniquement d’investigation clinique, et Liliane Morel-Maroger qui se révéla être une brillante anatomopathologiste active et pleine d’imagination. Les premiers travaux de physiologie furent consacrés à l’excrétion rénale des ions H+, ses relations avec la calcémie et la production de ces ions H+ au cours du métabolisme des aliments. D’autres portèrent sur les effets rénaux de la calcitonine et les mécanismes de l’excrétion urinaire de l’acide urique.

Le service connut son plein développement à partir de 1966 avec la disponibilité de nouveaux locaux de recherche et de soins et la création de l’Unité INSERM 64 dont l’intitulé “Néphrologie normale et pathologique” annonçait un vaste champ de recherches. De même, Gabriel Richet, lorsqu’il fut élu professeur titulaire de chaire en 1967,  donna à sa chaire le nom de “Chaire de néphrologie clinique et expérimentale” voulant dire par-là que ces deux aspects de la néphrologie étaient complémentaires et que le premier reposait sur le second. De  nombreux néphrologues furent formés à Tenon. Les uns restèrent à Paris comme Jean-Daniel Sraer, Françoise Mignon, Alain Meyrier, Jean-Philippe Méry, Pierre Ronco, Eric Rondeau et Michel Paillard, tous plus tard professeurs de néphrologie ou de physiologie et chefs de  service à l’Assistance Publique-Hôpitaux de Paris. D’autres comme Jean-Paul Fillastre et Claude Leroux-Robert créèrent des services de néphrologie, respectivement à Rouen et à Limoges. D’autres enfin restèrent en Ile-de-France comme Olivier Kourilsky, Alain Kanfer et Michel Beaufils. Quelques-uns firent carrière à l’INSERM comme Pierre Verroust et René Alexandre Podevin. Liliane More-Maroger, devenue Liliane Striker, quitta la France et poursuivit une brillante carrière aux États-Unis. Il en fut de même pour Claude Lechêne qui devint professeur à Harvard. Le Service d’Explorations fonctionnelles que je créais à Tenon travaillait en étroite liaison avec le Service de Néphrologie. Plusieurs de mes collaborateurs  que ce soit à l’Hôpital ou dans l’équipe que  je dirigeais à l’Unité INSERM furent aussi des élèves de Gabriel Richet comme Laurent Baud, Françoise Paillard, Josée Sraer et mon épouse, Nicole Ardaillou. Gabriel Richet laissait à ses élèves toute liberté pour définir et conduire leurs propres programmes de recherche. Il  administra l’Unité de recherches jusqu’à sa retraite en 1985. Auparavant, il avait réussi à étendre ses locaux dans un bâtiment construit par l’INSERM contigu de ceux dépendant de l’Hôpital et de l’Université. On doit remarquer que Gabriel Richet voulut toujours garder son propre programme de recherches indépendant  de celui de ses élèves. En plus de nombreux articles cliniques sur des maladies rénales, il s’intéressa essentiellement à deux sujets, les cellules du tube collecteur et la protéine de Tamm-Horsfall. Il était aidé dans son travail par Jacqueline Hagège, professeur agrégée de sciences naturelles dans un lycée de Paris qui occupait son temps libre au laboratoire. Eux deux, dans les années 1968-1970, étudièrent les modifications apportées aux cellules du tube distal et du tube collecteur du rat en alcalose ou acidose métabolique en utilisant les techniques histologiques classiques couplées à la microscopie de balayage. Ils analysèrent les caractères morphologiques qui opposent les cellules claires ou principales aux cellules sombres ou intercalaires, moins nombreuses que les précédentes. Ils montrèrent surtout qu’une surcharge en bicarbonates ou une acidose gazeuse augmentaient passagèrement durant la période expérimentale le nombre des cellules sombres  et en conclurent que ces cellules jouaient un rôle dans le transport  des bicarbonates. Ce type de modification était absent durant une acidose métabolique prouvant ainsi que des cellules différentes assuraient la sécrétion des ions H+. Ces travaux furent les premiers à introduire la distinction actuelle entre cellules intercalaires de type A et B, les premières intervenant dans la sécrétion des ions H+ et les secondes dans celle des bicarbonates. Gabriel Richet s’est également intéressé à la protéine de Tamm Horsfall ou uromoduline. Utilisant des anticorps monoclonaux obtenus dans le laboratoire, il étudia ses propriétés et sa distribution dans diverses néphropathies.

Gabriel Richet s’est toujours passionné pour l’enseignement. Dans le service, il était constamment disponible pour répondre aux demandes des étudiants et passaient beaucoup de temps à critiquer et corriger les observations. Il stimulait ses internes en les poussant à s’investir au laboratoire dans des travaux de recherche, ce qui leur apprenait comment concevoir des protocoles, les appliquer, traiter et  interpréter les résultats. Il tenait beaucoup à éveiller le goût de la recherche chez ses élèves, en faisant un élément essentiel de leur stimulation intellectuelle. Comme beaucoup d’enseignants, il jugeait néfaste le concours d’entrée aux études médicales en fin de première année lui préférant une sélection à la fin des études secondaires. Aux contributions scientifiques spécialisées qu’il écrivit, s’ajoutent de nombreux ouvrages didactiques sur l’équilibre hydroélectrolytique, la néphrologie et la sémiologie rénale, tous abordant la clinique par des données physiopathologiques. Réédités, ces livres ont nourri des générations d’étudiants.

Tenon devint rapidement un centre de néphrologie de réputation internationale. De nombreux médecins étrangers y effectuaient des stages  ou y passaient des années sabbatiques comme professeurs associés à la Faculté ou boursiers de l’INSERM. Je ne peux pas les citer tous ici, mais seulement quelques-uns : Detlef Schlondorff, membre de notre académie, professeur de néphrologie à Munich, alors chercheur au Mount Sinai Hospital de New York, Gary Striker, futur directeur de département au National Institute of Health, Morris Schambelan, endocrinologue à San Francisco, Stanislas Czekalski, professeur de néphrologie à Sczcecin en Pologne, Vadislav Stefanovic, professeur de néphrologie à Nis en Serbie, Hedi Ben Maïz, professeur de néphrologie à Tunis et, également, membre de notre Académie, Jean-Pierre Cosyns, anatomopathologiste belge, Kiyoshi  Kurokawa, professeur de néphrologie à Tokyo, Judith Withworth, professeur de néphrologie à Melbourne. Gabriel Richet avait organisé à Evian en 1960 le premier Congrès mondial de Néphrologie dont il fut le secrétaire au côté de Jean Hamburger et avait  participé à la création de la Société Internationale de Néphrologie (ISN) qu’il présida de 1981 à 1984. Il fut rédacteur en chef de Néphron, le premier journal de la Société. Des liens particuliers furent tissés avec le Service de Néphrologie de l’Université Rui Jin de Shanghai. Son responsable, Dong Dechang, envoya à Tenon de nombreux élèves dont Nan Chen qui lui a succédé et passa 5 ans à Tenon, est membre  de notre Académie.

Gabriel Richet fut élu à l’Académie en 1980. Il y joua un rôle actif et fut membre de son Conseil d’administration. Il participait aux travaux portant sur l’hôpital et l’enseignement de la médecine. En outre, il conduisait des travaux en histoire de la médecine et, principalement de la néphrologie. Citons son travail sur pierre Rayer qu’il considérait comme le premier néphrologue Français et celui sur le Rapport de Georges Cuvier sur les Progrès des sciences naturelles en France écrit en 1810 à la demande de l’Empereur. Par les dons qu’il fit à l’Académie, il permit la création du Fonds Charles Richet dans notre bibliothèque. Il accepta également d’exercer d’autres responsabilités comme sa participation au Comité national d’évaluation des universités à la demande de René Mornex qui en assura la présidence. La carrière de Gabriel Richet fut reconnue  exceptionnelle par les autorités publiques de notre pays. Déjà grand officier de l’Ordre national du mérite, il fut promu grand officier de l’ordre national de la Légion d’Honneur en 2012. A sa retraite, Gabriel Richet laissa un héritage impressionnant : deux services de néphrologie et une unité Inserm. Il fit plus que créer un centre de néphrologie à côté de celui de Necker. Il transforma l’Hôpital, par son exemple, en en faisant un véritable centre hospitalo-universitaire.

Quelle fut la personnalité de Gabriel Richet ? Il se décrit dans la dernière leçon qu’il donna à Tenon en octobre 1985 comme un “angoissé intellectuel”. Il voulait dire par là que dès le début de sa carrière médicale, il ne voulait pas se satisfaire d’une médecine purement descriptive, mais qu’il était angoissé par la soif de comprendre. Deux autres de ses qualités découlent directement de cette angoisse intellectuelle : l’ardeur au travail et l’ouverture aux autres. En effet, pour comprendre, il faut travailler et, pour apprendre, on a besoin des compétences et de l’aide des autres. Gabriel Richet travaillait beaucoup, lisait avec soin les principaux journaux de néphrologie et d’investigation clinique et voulait connaître tout ce qui se faisait dans son service et son laboratoire en matière de recherche. Il était très accueillant. Sa première pensée quand il rencontrait un chercheur pour la première fois était “Quelles idées nouvelles peut-il me donner ? Que peut-il m’apprendre ?”. Il s’enthousiasmait facilement et cherchait à orienter ses élèves vers de nouvelles directions. Il fallait souvent tempérer cet enthousiasme, mais comme il est écrit dans la parabole du semeur rapportée par Saint Matthieu, si beaucoup de graines meurent, il en est une, tombée dans la bonne terre, qui va germer et assurer la récolte.  Lorsqu’il recrutait un futur interne, les deux qualités auxquelles il était le plus sensible étaient l’imagination et le goût du travail. Il cherchait ainsi chez les autres ce qu’il portait en lui. Il ne supportait pas ceux qui ne respectaient pas leur contrat implicite, c’est-à-dire qui oubliaient l’aide apportée dans leur éducation et leur carrière  lorsqu’ils auraient dû s’engager pour défendre les intérêts du service et des autres médecins et chercheurs qui y travaillaient. La fidélité était pour lui une qualité à laquelle il était très attaché. Gabriel Richet était un homme généreux. Il manifestait un intérêt non feint pour la vie de ses élèves, était fier de leurs réussites et triste de leurs échecs.

Dans le dialogue éternel, si bien décrit par Molière entre Alceste qui dit “Je veux que l’on soit homme, et qu’en toute rencontre, le fond de notre cœur, dans nos discours se montre” et Philinte qui répond “Je prends tout doucement les hommes comme ils sont” et plus loin “le monde par vos soins ne se changera pas”, Gabriel Richet était résolument du côté du premier. Il l’a montré par son patriotisme, l’œuvre accomplie à Necker dans la construction d’une médecine scientifique et la création de la néphrologie et, plus tard à Tenon où il fit preuve de ses qualités de bâtisseur et  de chef d’École. Même si chaque génération doit faire face à ses propres problèmes, il restera  pour nous un exemple, peut être difficile à toujours  suivre, mais auquel nous essaierons de nous référer.

Hommage à Jean-François de la Croix, Duc de Castries (1938-2014)

Le conseil d’administration de la Fondation du Rein a la tristesse de vous faire part de la disparition de Jean-François de la Croix, Duc de Castries, administrateur de la Fondation du Rein depuis 2006, survenue le 2 janvier 2014, à l’âge de 75 ans.

Cet homme de talent et d’expérience, chef d’entreprise, savait conjuguer de multiples activités autour de valeurs authentiques que sont l’intégrité, la rigueur, la compétence, mais aussi la générosité, le respect d’autrui et l’ouverture au monde. C’était avant tout un ami et un être exquis, particulièrement attachant qui défendait avec courage et enthousiasme la cause des maladies rénales chroniques qu’il vivait dans sa chair.

La cérémonie religieuse sera célébrée le mercredi 8 janvier, à 14 h 30, en l’église Sainte-Marie-des-Batignolles, 77 place du Docteur-Félix-Lobligeois, à Paris (17e).

À son épouse France et à son fils Nicolas, nous exprimons nos plus sincères condoléances et les assurons de notre très profonde amitié dans ces moments particulièrement difficiles.

 

Dr Brigitte Lantz